La valse des convocations reprend en périphérie (26/09/2018)

Les résultats des élections ont peu de chances d’être attaqués, estiment les francophones des communes à facilités. Ces dernières s’apprêtent à envoyer des convocations uniquement en français.

Pure provocation, fustige Damien Thiéry (MR), candidat bourgmestre à Linkebeek. C’est ainsi qu’est apprécié, dans les six communes à facilités de la périphérie bruxelloise, l’envoi par le gouverneur du Brabant flamand de convocations électorales en néerlandais uniquement. Un acte qualifié d’illégal par les francophones et qui relance une valse des convocations coutumière des élections locales dans ces six communes. Wezembeek-Oppem a été la première à décider de s’asseoir sur la démarche du gouverneur et d’envoyer des convocations électorales en français aux électeurs qui en ont fait la demande. Les cinq autres communes (Kraainem, Rhode-Saint-Genèse, Linkebeek, Drogenbos et Wemmel) devraient suivre, selon un accord entre toutes.

« Le décret est très clair, ce sont les communes qui sont chargées d’envoyer les convocations électorales », défend Frédéric Petit, bourgmestre (MR) de Wezembeek. Il se base ensuite sur un arrêt du Conseil d’État issu des problèmes de nomination rencontrés par l’ex-bourgmestre de Linkebeek, Damien Thiéry, au lendemain des élections de 2012. L’arrêt de 2017 prévoit que tout francophone peut obtenir de sa commune (à facilités) ses documents administratifs en français pour quatre ans s’il en fait la demande. « Les convocations envoyées par le gouverneur sur ordre de Liesbeth Homans (N-VA), ministre flamande des Affaires intérieures sont nulles », poursuit Frédéric Petit. Véronique Caprasse, ex-bourgmestre DéFI de Kraainem, confirme: « Les gens peuvent jeter ces convocations et attendre celle qui sera envoyée par la commune ».

Pas de base légale
La tension va donc crescendo en périphérie. Mais ces envois multiples sont-ils de nature à fragiliser le scrutin ? « Des petits malins peuvent tenter d’invalider les résultats mais ils ont peu de chance d’y parvenir », dit Damien Thiéry. « C’est impossible compte tenu du décret flamand, on ne voit pas très bien quelle base légale pourrait appuyer une telle action », complète Frédéric Petit. Ajoutons que voter ne nécessite pas une convocation : une simple carte d’identité suffit.

Quant à la nomination des bourgmestres issus des élections du 14 octobre en périphérie, elle ne risque a priori pas grand-chose. « Nous avons deux arrêts du Conseil d’État pour nous, indique Valérie Geeurickx, bourgmestre de Linkebeek. Et je rappelle que l’envoi des convocations est un acte du collège et non du bourgmestre seul. » Damien Thiéry anticipe toutefois la stratégie que pourrait adopter le gouvernement flamand, toujours hostile à toute communication officielle en français. « En janvier, il pourrait refuser de nommer les bourgmestres, ce qui entraînerait des recours au Conseil d’État, vu les délais il y a de quoi reporter les nominations après les élections régionales de mai 2019 », estime-t-il.

En attendant, les six communes à facilités sont diversement parvenues à convaincre les électeurs francophones de faire leur demande d’inscription en français. Les résultats sont bons à Wezembeek avec entre 6 et 7.000 personnes ayant fait la demande, sur 8.800 électeurs, selon Frédéric Petit. Mais quasi nuls à Wemmel où la majorité néerlandophone n’a pas jugé bon d’informer la population, regrette Roger Mertens, (cdH) tête de liste francophone. On parle de 200 demandes. À Drogenbos des chiffres fournis par DéFI font état de 1.458 francophones sur 3.444 électeurs. À Rhode-Saint-Genèse, 5.000 des 7.000 électeurs francophones auraient fait la demande de documents en français selon une projection d’Eric Libert, échevin DéFI. À Linkebeek, on compte environ 1.300 demandes francophones sur un total de 3.000 électeurs environ, estime Valérie Geeurickx. La communication de Kraainem a permis de convaincre la moitié des électeurs francophones. Des chiffres à prendre avec prudence, toutes les personnes ayant demandé leurs documents en français n’étant pas forcément électeurs. « Le problème, c’est que ceux qui ne font pas de demande sont assimilés à des néerlandophones », déplore Véronique
Caprasse.

Une certitude, l’information aux habitants se poursuivra jusqu’aux élections législatives de 2019. Pour la prochaine valse de convocations.

Source : MATHIEU COLLEYN - L’ECHO 2018